dimanche 30 avril 2017

"La France moisie"


Pour s'écharper, grave, avec des Français, il suffit de parler politique. Ça peut vite devenir sanglant. Ça déborde, tout de suite, de haine, passion, ressentiment.

A cause de ça, j'évite absolument d'évoquer le sujet. D'autant que j'estime être mal positionnée. Je ressens toujours une certaine hostilité. De quoi je me mêle d'abord ? Et puis, on a vite fait de me juger privilégiée et, ensuite, j'incarne ce que l'on abhorre en France: la Finance (même si on ne sait pas ce que c'est), la Slave (forcément intéressée), Paris (forcément arrogante). J'ai tout pour paraître odieuse.


Je m'écrase donc, je ne dis rien, je me fais discrète, petite. Le dialogue m'apparaît, de toute manière impossible, inutile. J'ai l'impression de ne pas vivre dans le même monde.

La France, c'est un pays vraiment bizarre: la jalousie et la rancœur sociales y sont exacerbées. On considère que les riches ont, forcément, volé des pauvres mais on ne semble pas penser, non plus, qu'ils ont peut-être, aussi, créé des richesses.


Ce sont toutes les ambiguïtés de l'égalitarisme à toute force. L'égalité, c'est bien, c'est la logique démocratique mais sa dynamique comporte aussi sa part d'ombre: le risque d'une "tyrannie de la majorité" d'autant plus forte qu'elle s'appuierait sur la toute-puissance de l'opinion publique (Tocqueville).


Et puis, il y a la montée effrayante, en France, des populo-nationalistes avec une sombre rencontre de l'extrême-droite et de l'extrême-gauche (Le Pen-Mélenchon).

Des gens (évidemment mieux informés que moi), me disent souvent comme ça, avec condescendance, que l'extrême-droite est au pouvoir en Pologne et qu'en Ukraine, ce sont des néo-nazis. Là non plus, je ne dis rien mais ça me laisse rêveuse. On ne se pose pas la question de ce que je puis penser, moi, de la France ? Pays moderne, libéral, ouvert ? Les premiers résultats des élections permettent d'en douter.


Comme le constate l'économiste Pierre-Antoine Delhommais : "Un électeur sur deux s'est prononcé en faveur de candidats qui proposaient rien de moins que de faire éclater le "système" et l'Europe, qui rejetaient en bloc ou en détail la mondialisation, l'économie de marché et le libre-échange".

Ou alors, Peter Sloterdijk le grand philosophe allemand: "Avec 22 % pour le Front National, et presque 20 % pour les "insoumis" - insoumis au bon sens ?-, et en ajoutant les autres, on arrive à ce constat: à chaque élection, la moitié de la nation française s'offre une partie d'extase avec les extrémismes. Une chose est sûre: la France est profondément philistine, petite-bourgeoise, aimant savoir jusqu'où elle peut aller dans la haine de soi. Les philistins, c'est-à-dire les gens fermés aux arts, à la culture et à la nouveauté du monde"


Ce n'est évidemment pas très agréable de lire ça. La France, pays culturellement largué, frileux et enfermé dans ses rancœurs et ses affrontements populistes ?


Mais une chance historique de rompre avec l'archaïsme, la haine et l'unilatéralisme vient de se présenter. Elle est incarnée par "un jeune homme empreint de philosophie, dénonçant, dans le sillage de Spinoza, les "passions tristes" et célébrant la liberté, le savoir, l'universel.Tout être raisonnable devrait participer à cet événement dans un étonnement et une jubilation".

Dégageons donc les Mélenchon/Le Pen !


Tableaux de Marc ROTHKO (1903-1970), le grand peintre américain originaire de Lettonie.

Ce texte m'a été inspiré par un entretien du journal "Le Point" avec le philosophe allemand Peter Sloterdijk qui soutient évidemment Emmanuel Macron.

Emmanuel Macron: la culture, les Lumières, contre la bêtise, l'ignorance !

2 commentaires:

KOGAN a dit…

Bonjour CARMILLA,

En effet parler politique en ce moment génère beaucoup de friction, car chacun veut imposer ses idées, et bien souvent cela finit par des disputes et une forme de haine palpable au travers des médias, et même entre amis...

la véritable nature de l'humain apparaissant en plein jour et marquées sur les visages...

Comme j'ai très peu d'amis , je passe facilement au travers des désaccords et sans imposer mes points de vues.

Pour en revenir à ce... "sémillant jeune homme", à sa place, je serais resté dans la finance...au lieu d'arriver au "pouvoir".

A partir de 2008, Emmanuel Macron travaillait chez Rothschild & Co comme chacun sait.

Il s’y est fait remarquer entre autre, grâce à un "gros deal". En avril 2012,en pilotant le rachat, par Nestlé, des laits infantiles Pfizer: Une transaction "de plus de neuf milliards d'euros, qui a fait de lui un millionnaire(Le Monde)... et"sans attendre ses 41 annuités"...

Un banquier de son jeune âge a rarement la possibilité de ramener de nouveaux comptes.

S’il était resté à la banque, il aurait pris du galon après ça et aurait pû se rapprocher encore plus de la redoutable banque GOLDMAN SACHS...et de ses 30.000 moines officiant dans le monde...pour prospérer.

Mais il y a une femme derrière tout celà...La populace s'en délecte, la bave à la commissure des lèvres, en la critiquant bien comme il faut "à la française"...

j'avoue que ce n'est pas réellement une bombe mais qu'elle s'habille bien par contre, et qu'elle veut surtout laisser son empreinte...à bien le coacher comme beaucoup de femmes de présidents...en général.

De nouveaux "amis" se précipitent également à soutenir Macron, mais en politique et dans 95% des cas lesdits amis se transforment bien souvent en ennemis au bout de quelque temps(voirLR) .

Wait and see...

Bon courage à lui, il sera certainement élu à 65/35 je pense et j'espère, mais attention aux ordonnances brutales mais (nécessaires) qu'il fera...blocages et manifestations de rues comprises.

Ces dernières ne seront pas remboursées par la sécurité sociales, ni par les mutuelles, et les cotisations en forte hausse.


Bien à vous.
JEFF

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Jeff pour votre message !

On vit en effet, beaucoup, dans la haine en France, à droite et à gauche.

De plus en plus, je lis, j'entends (Le Pen, Mélenchon), que Macron serait le pantin de "banquiers juifs". C'est odieux, effrayant, dans un pays qui s'est autrefois mobilisé pour Dreyfus !

Mais avec la haine,le complotisme, la démagogie, on ne construit rien !

Je conçois que Macron puisse irriter. Il est "too much", il représente tout ce que nous n'avons pas été capables de devenir.

Mais la question n'est pas là. La question est celle de la défense de la démocratie et de la liberté. Avec ça, on ne saurait ni transiger, ni exercer de chantage.

Mettez de côté vos haines, vos aigreurs, vos ressentiments !

Carmilla

PS : je renvoie par ailleurs à la dernière déclaration de Cohn-Bendit à laquelle je souscris entièrement.

J'aime bien aussi Brigitte Macron qui est, paraît-il, une femme remarquable, très cultivée.