dimanche 16 août 2015

"Je m'en vais"


Enfin! Quelle joie! Je pars lundi, à l'Est, pour 3 semaines. En plus, les températures viennent de s'effondrer !


Je n'ai pas de grandes ambitions pour ces vacances. D'abord de petites villes, tout à fait à l'Est de la Pologne: Zamosc, Bilgoraj, Lezajsk, Lancut, Sanok, Sandomierz. Je ne crois pas que ça évoque grand chose. 

Ensuite, je m'établirai en Ukraine, à Lviv (mon point d'ancrage, cette année, c'est le Swiss Hotel).  Je rayonnerai à partir de là. Mais je n'ai pas envie de beaucoup bouger. Juste rencontrer mes copains/copines et délirer, pleurer, un peu ensemble.


J'imagine que ça ne fait pas beaucoup rêver. Au regard des standards touristiques actuels, c'est sûrement moche de chez moche. Pourquoi pas aller, plutôt, passer des vacances à Hagondange ou à Fourmies ? Les côtes méditerranéennes sont tellement plus belles. Mais moi, je pense qu'on peut passer des vacances aussi extraordinaires à Noeux-les-Mines qu'à Saint-Tropez.

Certains lecteurs m'écrivent pour me dire qu'ils aimeraient bien m'accompagner dans mes voyages mais ils risqueraient fort d'être décontenancés. A vrai dire, je ne suis pas à la recherche des belles choses mais, plus simplement, de ce qui m'émeut. Ce sont des choses différentes.




Il s'agit d'abord, pour moi, de changer de peau, d'identité: parler d'autres langues, m'habiller différemment, manger autre chose.

Parler français, parfois, j'en ai marre, ça me fatigue! Je pense que je m'exprime correctement mais, émotionnellement, je ne sens pas ça complètement. Ça reste du fonctionnel.


La cuisine ? Je vais être honnête, la cuisine slave, ça n'est pas terrible ! C'est à peine mieux que la cuisine allemande. C'est fruste, basique, mais ça n'est pas déplaisant non plus et ça me manque un peu parce qu'un restaurant russe, polonais ou ukrainien, ça n'existe pas, vraiment, à l'Ouest. Partout où je me suis aventurée, j'ai trouvé ça "à côté" (c'est la cuisine slave telle que les Français se l'imaginent). La vraie cuisine ukrainienne, on ne la mange qu'en Ukraine (et spécialement à Lviv) et je m'en pourlèche déjà les babines. Je rêve déjà de tout un tas de trucs diaboliques: une solyanka au poisson, des varenyky, des harengs, de la carpe, du poisson-chat.


L'habillement, ça, pour moi, c'est le plus important ! Dans un pays slave, on fout la paix aux femmes. On ne se fait pas harceler dans la rue, les cafés, les restaurants. On peut même s'habiller comme des putes, personne ne vous dira rien. C'est vraiment reposant par rapport à la France où il faut gérer 10 frustrés par jour. A l'Est, j'ai l'impression de retrouver une certaine liberté, d'action, de déplacement. Quel soulagement !



Mais évidemment, c'est plus compliqué que ça. C'est sûr qu'on vous fout la paix en Ukraine ou en Russie, mais c'est sûr, aussi, qu'il y a une terrible séparation des sexes. On s'ignore, on vit chacun de son côté (il y a le monde des bonnes femmes et celui des mecs), on est comme des Japonais. En Pologne, c'est différent: on vous fout la paix mais on s'intéresse, en même temps, à vous.


Mais peu importe..., je prépare, en ce moment, mes bagages et ça, c'est très compliqué. 20 kgs, c'est bien sûr absolument impossible pour 3 semaines. Il y a d'abord les incompressibles: 4 appareils photo (je n'ai pas pu résister et je viens de m'en acheter encore un, un très grand angle), 2 tablettes, 10 livres, 10 culottes et soutifs, 10 robes, jupes, chemisiers. Impossible pour moi, en effet, de ne pas changer tous les jours de tenue: je suis tout de même une parisienne! Mais faire un choix pour tout ça, c'est déchirant.


Le pire, ce sont les chaussures: une Ukrainienne qui se respecte doit avoir, au moins, 10 paires d'escarpins avec des talons d'au moins 10 cms. J'essaie de régler ça sur place. Pour les cadeaux aussi, j'ai trouvé la solution : pour mes copines, c'est simple, ce qu'elles souhaitent le plus, c'est que je leur amène de la lingerie française; je suis donc une grande cliente d'Aubade. C'est cher mais ça fait grand plaisir, c'est complètement en phase avec l'esprit du pays et ça ne pèse rien.


Images d'Andreï TARKOVSKY (1932-1986), le grand cinéaste russe. Hormis les deux premières (extraites de son film "Stalker"), il s'agit de Polaroïds qu'il a réalisés lui-même.

Je précise enfin qu'à l'occasion de ses vacances, Carmilla suspend également, comme à l'habitude, ses publications durant 3 à 4 semaines; mais je demeure, bien sûr, toujours, contactable par mail ou commentaire. A bientôt !

samedi 8 août 2015

"Moi, j'aime pas la mer"


J'ai quelques admirateurs et, bien sûr, ils me demandent où ils peuvent espérer me rencontrer cet été. C'est compliqué, ça peut être aventureux de me trouver, mais ce qui est sûr, c'est qu'on a très peu de chances de faire ma connaissance sur une plage, même si, ces dernières années, je suis quand même allée à la mer:

- en Suède (l'île d'Öland), 
- en Pologne (à Sopot), 
- en Lituanie (la presqu'île de Neringa), 
- en Crimée, à Yalta
- à Odessa. 


Mais tout de même, la mer, la plage, ça n'est pas vraiment mon truc même si j'aime bien l'exhibition qu'on y fait de soi. Triompher, c'est ça qui est important sur une plage. C'est peut-être affreux mais c'est comme ça, c'est le jeu impitoyable des signes! De ce point de vue, pour moi, ça va: je suis toujours impeccable physiquement: pas l'ombre d'un soupçon de graisse! Le sport, ça sert quand même à quelque chose.


Mais ça n'est pas ça... La mer, ça me renvoie à mes souvenirs d'enfance où je m'ennuyais à périr, le cul sur une plage, à fixer désespérément l'horizon des journées entières. Les paysages maritimes, quoi qu'on en dise, c'est le néant, le zéro du zéro. La flotte, le ciel et c'est tout. Le monde binaire absolu. Rotkho ou Malevitch, c'est bien mais je trouve, quand même, qu'il faut être vraiment zen, contemplatif, pour aimer ça. Ça n'est pas du tout mon état d'esprit.

Et qu'on ne me dise pas que les paysages maritimes sont tous différents: la Mer Blanche, elle est exactement comme la Mer Noire, de même que la Mer de Chine, c'est comme la Mer du Japon, l'Atlantique comme le Pacifique, je n'ai jamais vu aucune différence. Il y a plus ou moins de soleil, c'est tout !

Le pire pour moi, c'est le bateau, les excursions en mer, yacht ou voilier. Quelle punition, quelle angoisse! Etre prisonnier d'un espace confiné (pendant des heures, des jours), à ne pouvoir rien faire, et être obligé de déclarer que c'est formidable, magnifique, quelle horreur ! On est tout contents quand on croit entrapercevoir un poisson ou une mouette, c'est la seule distraction. J'en sors à bout de nerfs. Rien n'est plus déprimant que de glandouiller dans un lieu fermé, entassés les uns sur les autres. Le bateau, pour moi, c'est une forme d'expérience du monde carcéral et je ne comprends pas que ça plaise à tant de gens. 


Pourtant, j'aime bien la natation. Nager sous l'eau, en apnée, c'est même ma grande spécialité. Ça m'amuse de faire peur aux autres qui se demandent si je vais bien remonter à la surface. Mais nager, c'est ennuyeux aussi. Il paraît que les grands champions s'entraînent à raison de 5 ou 6 heures par jour. Je ne sais pas comment c'est psychologiquement possible.


Mais de toute manière, ça n'est pas envisageable cette année. Je pars en Ukraine mais où est-ce que je peux aller ? La Crimée, ça n'est plus possible; la mer d'Azov, c'est bien mais c'est très dangereux, on se fait tirer dessus, sur les plages, depuis la Russie (allégations bien sûr mensongères, dictées par Washington, selon les Ministères russe et français de la Propagande).Quant à Odessa, les plages y sont vraiment affreuses, dégoûtantes.


Le titre de mon post est celui d'un livre (que je n'ai pas lu) de Françoise Xenakis, l'épouse du grand musicien (décédé en 2001). Indépendamment de l'admiration qu'elle lui vouait, elle a vécu un calvaire: chaque année, son mari lui imposait de passer tout un mois à traîner, en bateau, d'une île grecque à l'autre. Je compatis.

Quelques affiches fin 19 ème, début 20 ème siècle. L'esthétique populaire était, peut-être, plus raffinée qu'on ne l'imaginait. J'aime beaucoup, en particulier, la seconde affiche. Elle est de :

- Henri PRIVAT-LIVEMONT (1831-1936), peintre-affichiste belge.

Je recommande, enfin, tout particulièrement, 2 films:

- "La dame dans l'auto avec des lunettes et un fusil" de Joan SFAR. Je m'y suis complètement retrouvée. J'adore moi-même frimer au volant de ma belle BM. Rien de plus séduisant, mystérieux, qu'une jolie fille conduisant une voiture de sport.

- "Summer" de Alanté KAVAITE. Un amour entre jeunes filles en Lituanie. Les critiques dans la presse bien pensante ("Le Monde", "Libération") ont été exécrables. Moi, j'ai adoré; je n'y ai vraiment pas vu les mêmes choses; j'y reviendrai.

dimanche 2 août 2015

En France, je n'aime pas


En France, je n'aime pas:

- le climat: jamais de froid, jamais de neige, des étés étouffants. Mais, visiblement, on adore la chaleur et on arbore, obligatoirement, une mine réjouie quand il fait plus de 30 °. La climatisation, ça n'existe pas parce que tout le monde tombe instantanément malade. Et s'il fait moins de 0°, tout le monde meurt !


- les cafés: je choque toujours beaucoup quand je dis ça mais, vraiment, les cafés, en France, je trouve ça consternant; ils sont innombrables mais presque tous moches, ultra-populaires, avec une décoration à hurler. Ça convient à des poivrots mais pas à des esthètes. D'ailleurs, il n'y a que des bonshommes dans les cafés. Des endroits avec une belle architecture, un beau mobilier, où l'on puisse passer des heures à rêver, ça n'existe quasiment pas. C'est un peu pareil dans les restaurants. On y mange bien mais, souvent, dans un cadre miteux et dans des conditions de grande promiscuité. Le décor, la belle table, généralement, on  s'en fout !


- le petit déjeuner. La France s'enorgueillit de sa cuisine qui serait la meilleure au monde. Peut-être... mais ce qui est sûr, c'est qu'elle remporte, sans conteste, la palme des plus mauvais petits-déjeuners au monde (à égalité, peut-être, à mon avis, avec la Serbie). C'est vraiment un supplice de prendre un petit déjeuner dans un hôtel français: d'horribles confitures, des croissants racornis et un café lavasse. Il y a vraiment là 50 ans de retard et il faudrait peut-être s'inspirer de ce qui est offert ailleurs, notamment en Europe Centrale.


- les villages de province: ils sont piteux, déglingués, délabrés; rien à voir avec les villages proprets ou de contes de fées allemands ou scandinaves. Je me dis que, finalement, c'est à peine mieux qu'en Ukraine ou en Pologne. Mais c'est moins un problème économique que culturel: les apparences, l'habitat, ça n'est pas une préoccupation première. Quant aux villes de banlieue, c'est encore plus sinistre mais, là, ça n'est pas vraiment imputable à la France: c'est issu de la haine et de l'esprit victimaire.


- une culture vinicole et culinaire incompréhensibles. A chaque fois que je suis invitée chez des Français, on m'assomme de recettes de cuisine et de choix de grand crus. Je suis complètement larguée, je ne sais que dire, moi qui ne bois que de la bière et ne mange que du poisson et des coquillages 


- la chanson et la musique de variétés françaises. Ça, ça me dépasse complètement !  C'est là que j'éprouve le plus les différences culturelles. Rien ne trouve grâce à mes yeux dans l'actualité musicale française. Tout m'apparaît horrible ou d'une incroyable mièvrerie. Seuls m'intéressent un peu Michel Polnareff, Serge Gainsbourg et Catherine Ringer mais c'est sans doute en raison de leurs origines slaves. Mais il est vrai, aussi, que je ne suis pas une grande musicienne.


- la manie  de se faire systématiquement la bise entre hommes et femmes. Il paraît que c'est une pratique récente. Ça m'horripile! Je trouve ça, sous des dehors sympas, copins/copines, d'un machisme total. 


- la drague appuyée dans les espaces publics. J'ai toujours pensé qu'il valait mieux vivre dans un pays où il y a des dragueurs, c'est à dire un pays où il y a une culture de la séduction. C'est tout de même ça qui fait le piment de la vie. Le problème, c'est qu'en France, les dragueurs exercent, indirectement, une véritable police des mœurs; ils deviennent les gardiens de l'ordre moral. La preuve, c'est que les Françaises se font de plus en plus discrètes dans leur tenue vestimentaire (pantalon, chaussures plates, pas de maquillage) et qu'on ne peut plus vraiment s'habiller comme on veut. C'est une évolution inquiétante trop rarement dénoncée (il n'existe que "la journée de la jupe" qui a beaucoup de mal à mobiliser).
  

Voici mes quelques remarques critiques sur la France. On va peut-être penser que je suis mal intégrée. C'est possible mais je pense que mes critiques sont anecdotiques et qu'essentiellement, j'aime et connais la culture française. Qui aime bien, châtie bien, dit-on.


Tableaux de Martial RAYSSE (né en 1936). Il était devenu très célèbre dans les années 60 en participant au mouvement des Nouveaux Réalistes. Il a ensuite bizarrement disparu de l'actualité artistique pour réapparaître à la fin des années 90. Le musée Beaubourg lui a, l'an dernier, consacré une exposition. Ses dernières œuvres sont en totale rupture avec sa période Pop Art. Je trouve ses derniers tableaux très forts et très troublants. Malheureusement, les images internet n'en donnent qu'une pâle idée.