dimanche 29 septembre 2013

Sacher Masoch au pays des femmes


Sacher Masoch (1836-1895) est maintenant une célébrité à Lvov alors qu’à l’époque soviétique, son œuvre était évidemment passée sous silence.

L'entrée de l'immeuble où serait né Sacher Masoch au 22 rue Copernic

Mais pas seulement en U.R.S.S. Après avoir été très célèbre de son vivant et notamment en France où il a reçu la Légion d’Honneur, il est complètement tombé dans l’oubli au 20ème siècle.


Pourtant, indépendamment de ses aspects psychologiques, son œuvre est une extraordinaire source d’information sur le monde slave. D’ailleurs Masoch ne parlait pas seulement l’allemand mais aussi, parfaitement, l’ukrainien (appris auprès de sa nourrice adorée) et le polonais.


L'escalier de l'immeuble de Masoch

Ce que j’ai retenu de la vie de Masoch, c’est qu’il a fait des études de droit et que son père était Préfet de police de la Galicie, un personnage tout puissant mais éclairé. Juriste et flic, voilà deux professions qui me font personnellement tout de suite frémir : des métiers de pervers.


La statue de Masoch à Lvov

Toute l’œuvre de Masoch est marquée par la fascination pour la femme slave. Les femmes slaves seraient, presque sans exception, des despotes nées. Elles incarneraient l’inimitié naturelle des sexes et la trouble affinité entre la cruauté et la volupté.



C’est évidemment un peu excessif mais c’est sûr qu’être une femme dans un pays slave, ça n'a rien à voir avec la France, l’Allemagne, les pays scandinaves et anglo-saxons. Ces fortes différences de statut de la femme, c’est d’ailleurs la source majeure des incompréhensions culturelles.


Bien sûr, il y a des nuances importantes entre une Russe, une Polonaise et une Ukrainienne. Mais toujours, le monde slave, c’est l’affirmation d’une féminité flamboyante et triomphante.


Ce qui me réjouit, c’est que si Sacher Masoch renaissait aujourd’hui, il ne serait pas tellement dépaysé en parcourant les rues de la ville de Lemberg/Lvov.


La façade de l'Hôtel George fréquenté par Masoch où il aurait écrit "La Vénus à la fourrure"

Partout des filles sublimes, scandaleuses, qui arpentent dédaigneusement les grandes avenues en prenant bien soin de s’exhiber à la terrasse des cafés. Le plaisir fou de se mater, d’échanger des regards, de foudroyer l’autre.


C’est sûr qu’on n’est pas en Europe de l’Ouest et en France en particulier : la négation de la différence des sexes, le refus du féminin et l’interdiction de la séduction, là-bas, ce n’est pas encore à l’ordre du jour.


Photographies de Carmilla Le Golem toutes prises à Lvov sauf la 1ère .

Il s’agit d’abord de l’immeuble et de l’appartement où serait né Sacher Masoch. C’est au 22 de la rue Copernic à Lvov. Malheureusement, le lieu de sa naissance est controversé.

Ce qui est sûr, c’est qu’il a fréquenté l’Hôtel George où il aurait écrit « la Vénus à la fourrure ».

Et il y a aussi tout le quartier de l’Opéra de Lvov.



Si vous voulez vous initier à Sacher-Masoch, je vous recommande, outre l’incontournable « Vénus à la fourrure », un recueil de 10 nouvelles : « Femmes slaves » publié récemment chez Pocket. 

dimanche 22 septembre 2013

Littérature de l’Apocalypse : Joseph Roth, Georg Trakl, Paul Celan, Bruno Schulz



Les écrivains que j’aime, il faut que j’aille visiter les lieux où ils ont vécu. Ca me paraît même indispensable.

Je sais bien que ça n’est pas en accord avec les théories en vigueur mais j’ai tendance à penser qu’on ne peut pas bien comprendre un écrivain sans connaître sa biographie, sa langue, sa culture. Est-ce que ça a un sens de lire Proust sans connaître Paris et Cabourg ?  Rimbaud sans Charleville, Alfred Döblin sans Berlin, Dostoïevsky sans Saint-Pétersbourg, etc... ? Pour ce qui me concerne, la littérature japonaise m’est apparue plus accessible après mes voyages.

Donc j’aime bien les voyages littéraires. Alors voilà ce que j’ai ramené de mes vacances en Ukraine :

Joseph ROTH (1894-1939). Il est né et a vécu, dans son enfance, à Brody. 


La rue principale de Brody

C’était et ça demeure un fichu trou, une ancienne ville-frontière  avec l’Empire russe. Les langues dominantes y étaient le polonais et le yiddish. Curiosité : la mère de Sigmund Freud est elle-même née à Brody.


Le fameux Hôtel Savoy de Brody

La vie de Joseph Roth a été marquée par l’humiliation de la 1ère guerre mondiale (à la quelle il n’a pas participé, ayant été jugé inapte), puis l’effondrement psychologique de sa femme, Friedl, qui a progressivement sombré dans la folie. Enfin, il a lui-même sombré dans l’alcoolisme jusqu’à en mourir, assez jeune, à Paris en 1939.


Les ruines de la grande synagogue de Brody

En France, on ne connaît  de Joseph Roth que « La marche de Radetzky ». Je n’aime pas du tout ce livre, très monarchiste. Je recommande plutôt : « Hôtel Savoy » , « La fuite sans fin » qui décrivent très bien la Galicie il y a un siècle.



Georg TRAKL (1887-1914).  

L’un des poètes majeurs du 20 ème siècle, un écrivain culte en Autriche et en Allemagne. Le « Rimbaud allemand », malheureusement peu connu en  France  en raison, probablement, du caractère intraduisible de la poésie.


La ville de Grodek

Il faut absolument lire TRAKL.

Un auteur absolument sulfureux, tourmenté par son addiction aux drogues et surtout par sa relation incestueuse à sa jeune sœur adorée. Elle les avait menés à une grossesse et un avortement.

Ce qu’il faut savoir, c’est que Georg Trakl a été enrôlé, parmi les personnels de santé, dans l’armée autrichienne au début de la 1ère guerre mondiale. 


Ca s’est très mal passé puisque les Autrichiens ont d’abord été complètement débordés  par les Russes et ont été à deux doigts de la rupture. Il s’en est d’ailleurs fallu de peu que l’histoire du monde ne bascule à ce moment avec la conquête de Vienne par les Russes.


 Georg Trakl a, quant à lui, participé à la bataille de Grodek. Il a été tellement épouvanté par le spectacle de la mort et des massacres qu’il a tenté de se suicider dans ce petit hôpital militaire dont je vous livre ici la photo et qui n’a sûrement pas beaucoup changé depuis un siècle. 


Georg Trakl est mort quelques jours plus tard, après son transfert à l'hôpital de Cracovie.



Paul CELAN (1920-1970)


Un autre très grand poète de langue allemande, originaire de la ville multiculturelle de Czernowitz (tout à tour autrichienne, roumaine, soviétique, ukrainienne).


La célèbre gare de Czernowitz


Voici la maison natale de Paul Celan. Il faut retenir qu’après la guerre, Paul Celan a vécu à Paris où il s’est suicidé, en 1970, en se jetant dans la Seine.


Le centre de Czernowitz


Bruno SCHULZ (1892-1942)


La place centrale de Drohobycz

L’écrivain majeur de la littérature polonaise d’avant guerre, aux côtés de Witold Gombrowicz et S.I. Witkiewicz. 


La maison de Bruno Schulz

L’auteur des « Boutiques de cannelle » et du « Sanatorium au croque-mort » qui ressuscitent un monde juif surréaliste et merveilleux. 


Pas seulement écrivain mais aussi peintre et dessinateur. Il a vécu dans la ville de Drohobycz, où il était professeur de dessin et de travaux manuels. 


Il a été assassiné, dans la rue, en 1942, par un officier nazi.




Le parc où Bruno Schulz est mort. Une plaque commémorative

Tableau de Egon Schiele


Photographies de Carmilla Le Golem

samedi 14 septembre 2013

Sur les pas de Gogol


J'ai toujours été émerveillée par l'oeuvre de Nicolas Gogol. Surtout "Les âmes mortes" et "Les soirées du hameau".


Zolkiew

C'est la description de la campagne ukrainienne, primitive et magique.


Mais la campagne décrite par Gogol existe aujourd'hui encore.


Le château d'Olesko

Un vaste territoire encore à l'abri de la mondialisation.


Ca me passionne et mon grand plaisir, pendant mes vacances, c'est de prendre ma petite voiture et de sillonner inlassablement la campagne.


Le DNIESTR à Zaleszczyki. Un des lieux que j'aime le plus en Ukraine qui fut le théâtre d'événements dramatiques au début de la 2nde guerre mondiale.








ZALESZCZYKI


Brody



Tarnopol


Le château de Podhorce


Le château-forteresse de Khotyn construit par les Polonais pour se protéger des Turcs. Aujourd'hui, en face, c'est la Roumanie.


Kremenets et les ruines du chateau de la reine Bona Sforza qui, au 16 ème siècle, aurait égorgé plus de 300 vierges pour satisfaire son rêve de jeunesse éternelle.




Tarnopol

Kremenets


Kamenets Podolsky





Pochaiv



Kremenets


 Berezhany



Kamenets Podolski, le Carcassonne ukrainien mais je pense plutôt que c'est Carcassonne qui est le Kamenets français.






En exclusivité une photo de ma copine Daria, au centre, qui m'a accompagnée pendant plusieurs jours. Je suis très fière de cette photo dont elle et moi seules pouvons comprendre toute la signification.


Buczacz


Photographies de Carmilla Le Golem en Galicie