dimanche 9 décembre 2012

« I don't know where I begin, and where you end”



Je recommande :

-         Renata Salecl : “La tyrannie du choix”. J’ai consacré un post à ce bouquin lumineux d’une philosophe slovène. Une critique de l’idéologie dominante : celle de la liberté que nous aurions de choisir dans tous les domaines

-     Anne Serre : « Petite table sois mise ». Un bouquin stupéfiant. Il ne fait que 60 pages mais c’est vraiment un grand livre. Un magnifique conte érotique inspiré des frères Grimm. A lire absolument en ces temps de moralisme sexuel. Ca démarre comme ça : « La première fois que je vis mon père vêtu en fille, j'avais sept ans. ». Un peu plus loin: « Maman était nue la plupart du temps. » « Tu n'as pas de pudeur, disait papa. » On est chez une aimante famille bourgeoise provinciale qui pratique avec allégresse l'inceste. Ca n’est ni du Christine Angot ni de l’auto-fiction. C’est plein d’allégresse et ça a une espèce de puissance lumineuse. Ca répond à cette question essentielle : « comment on se construit ? ». Il y a une magnifique scène originelle : « la table au disque luisant ».

-         Emmanuelle Guattari : « La petite Borde ». Un autre récit très bref mais parcouru de fulgurances. Il  a pour cadre la célèbre clinique La Borde dans les années 60. Qu’est-ce que c’est, être la fille de quelqu’un qui devient plus tard célèbre (Felix Guattari) ? Evidemment pas du tout ce qu’on imagine. L’enfance, ses souvenirs, ce n’est pas un long fleuve tranquille. C’est complètement discontinu : des images coup de poing et des moments d’inquiétude, d’angoisse, mais aussi une espèce de paradis perdu, enchanté et vénéneux.

-         Nahal Tajadod : « Elle joue ». La confrontation de deux iraniennes : Nahal Tajadod, l’épouse de Jean-Claude Carrière, qui a grandi dans l’Iran du Shah des années 70 et une jeune comédienne, née après la Révolution, au succès grandissant. La complexité et la richesse intellectuelle d’un pays que l’on croit obscurantiste.

-         Alexandre Adler Vladimir Fedorovski : « L’islamisme va-t-il gagner ? » En France, on s’excite beaucoup sur l’Islam mais on n’en a qu’une vision très restrictive, du moins sur le plan géographique. Ca se limite pour l’essentiel aux pays du Nord de l’Afrique. Le premier mérite de ce bouquin, c’est d’avoir une vision beaucoup plus vaste englobant aussi l’Asie Centrale, l’Iran, l’Irak, la Turquie, la Syrie. Est aussi rappelé le rôle historique important de la Russie (moins nocif qu’on ne l’imagine).  Beaucoup d’analyses très innovantes. Est même évoquée la constitution possible d’un nouveau bloc rassemblant la Turquie, l’Iran et l’Irak face au sunnisme arabe. De très loin, l’un des meilleurs livres sur la question.

-         Tobie Nathan : « Ethno-Roman ». Les souvenirs du grand ethno-psychanalyste, disciple de Georges Devereux. Une vie passionnante : Le Caire, Rome, Paris en 68. Une native complicité avec les mythes, les légendes et, d’une manière générale, avec la “pensée magique”

-         « Les derniers jours des dictateurs » sous la direction de Diane Ducret et Emmanuel Hecht. Les derniers jours de Mussolini, Ceausescu, Staline, Franco, Brejnev, Amin Dada, Ben Ali etc…Un demi-siècle d’histoire, ponctué par le mensonge et le crime, raconté par les meilleures plumes historiques et journalistiques.

-         Josef Schovanec : « Je suis à l’Est ». Un récit étonnant, peut-être pas un grand livre mais qui m’a appris plein de choses sur la réalité concrète de la schizophrénie  et sur les difficultés de la socialisation. Ce qui nous semble simple, évident (parler, échanger, se débrouiller dans la vie quotidienne) ne l’est en fait pas du tout. Un jeune autiste, d’origine tchèque, génial et inadapté social. C’est aussi le récit révoltant d’une prise en charge psychanalytique et psychiatrique dont les préoccupations semblent avant tout mercantiles.

- Eugen RUGE : « Quand la lumière décline ». Un grand roman historique à l’allemande couronné par le « Deutscher Buchpreis » (l’équivalent du Goncourt). De Mexico à Berlin en passant par Moscou, la vie d’une famille et d’un monde sur quatre générations.

Enfin, à Tokyo, j’avais avec moi « 1Q84 » d’Haruki Murakami (les 2 premiers tomes), le plus célèbre et nobélisable des écrivains japonais. Ca a déjà plus d’un an et ca dépasse donc le cadre de cette chronique. Ce très gros bouquin est à bien des égards fascinant : qu’est-ce qui se passe quand les portes du temps s’ouvrent ?  Quand s’établissent des voies de communication entre deux univers, deux ères. C’est prodigieux mais il y a aussi quelques faiblesses. Je crois qu’il faut essayer de le lire à toute allure.

Un mélange hivernal composé de tableaux d’Andrew Wyeth, Arkhip Kuinji, Harald Sohlberg, Joseph Maria Pilartz, Marianne Von Werefkin, Evgeny Kouznetsov, Zygmunt Waliszewski, Herbert von Reyl-Hanisch, Ivan Shishkin, Ivan Bilibin

4 commentaires:

Anonyme a dit…

J'ai retenu Anne Serre et Tobie Nathan (j'ai dejà lu qqche) excellent . Où voyez-vs les tableaux ,expos (certains) en fouillant chez votre libraire ? ils sont tous intéressants , et permettent un oeil neuf ; vite, une suite ! Lola

Carmilla Le Golem a dit…

En effet, Lola, Anne Serre, c'est vraiment un des grands livres de cet automne.

Sinon, c'est vrai qu'on me demande souvent où je trouve mes images.

En fait, je ne suis pas si originale que ça et ça ne me demande pas beaucoup d'efforts de recherche. Ce que je poste est, dans sa majorité, issu de la culture de l'Europe Centrale. C'est peut-être peu connu en France mais, là-bas, c'est tout de suite identifié. J'ai donc, tout simplement un autre cadre de référence.

Carmilla

KOGAN a dit…

Bonjour CARMILLA

Vous avez oublié de citer le peintre en tête de post: RAFAL OLBINSKI... sublime et minimaliste tableau "criant" de vérité, dans une belle inspiration de MAN RAY....
Comme dirait...KARL....J'adore!!! (Comme le café et le COCA mélangés ...j'adore!!!)


JEFF

Carmilla Le Golem a dit…

Non, non, Jeff !

Ce n'est pas un Olbinski en tête de ce post. Je ne sais plus qui, à vrai dire. Il faut que je recherche.

Cela dit, j'aime bien Olbinski. Il est l'un des grands affichistes, illustrateurs polonais.

Carmilla