samedi 16 avril 2011

Lisières des mondes


D’abord, il faut vous précipiter pour aller voir le dernier film de Jerzy Skolimowski : « Essential killing ». Un film comme ça, vous en voyez un tous les dix ans. Pas de dialogues, de l’écriture pure, des images sidérantes, d’une beauté picturale. Surtout, une réflexion sur ce qu’est être un autre.


Après, vous pouvez lire quelques livres récents de voyage.


En premier lieu, le best-seller italien de Fabio Geda : « Dans la mer, il y a des crocodiles ». J’ai vraiment bien aimé : un livre très humain et une description à mes yeux très juste et très émouvante du Moyen-Orient (Pakistan, Iran, Afghanistan). En complément, il faut lire l’excellent : « Retour à Peshawar » de Renaud Girard (Grasset).


Plus loin vers l’Est, avec les deux petits bouquins de Claude Levi-Strauss sur le Japon : « L’anthropologie face aux problèmes du monde moderne » et « L’autre face cachée de la lune ». C’est évidemment très fort mais il semble que ça ait laissé un peu rêveurs les Japonais. C’est sûr qu’on a le sentiment d’un « placage » théorique.


Sur le Japon, je recommande plutôt « Tokyo, ville flottante » de François Laplantine et surtout : « Au Japon, ceux qui s’aiment ne disent pas je t’aime » d’Elena Janvier ; une petite merveille de fraîcheur, d’humour et de pertinence; de la vraie ethnologie appliquée..



Retour vers ma chère Europe Centrale avec trois livres qui viennent tout juste de sortir :

- Paolo Ruiz : « Aux frontières de l’Europe » (éditions Hoëbeke)

- Cédric Gras : « Vladivostok » (Phébus)

- Olivier Rolin : « Sibérie »


Quelques défauts, quelques erreurs, mais pas trop de clichés; je conseille presque sans réserves. Des voyageurs cultivés et sans préjugés qui ne vous resservent pas la sempiternelle soupe journalistique sur la Russie et les pays de l’Est.


Ces bouquins m’ont rendue nostalgique avec un besoin fou d’échappée, d’évasion. D’autant plus que Paris s’est brusquement vidée depuis une semaine. C’est étrange et consternant.




Disparaître, devenir immatérielle, irréelle. Aborder des horizons lointains aux frontières indécises. Les lisières, les bordures, les limes...


Je ne sais pas de quels endroits vous rêvez. Moi, ce sont des régions improbables, aux noms magiques, aux sonorités évocatrices : connaissez-vous la Mazurie, la Prusse Orientale, la Carélie, la Courlande, la Ruthénie, la Volhynie, la Polésie ?


Probablement pas. Je n’ai jamais vu une agence de voyages inscrire ces destinations à son programme. Pourtant, tout cela existe bien et ce sont même des régions très belles et très vastes, généralement à cheval sur plusieurs pays.


C’est dans ces régions intermédiaires, multiculturelles, polyglottes que j’aime me perdre. Les lieux interlopes, voilà où je me sens la plus libre.


Images de Katerina Belkina; née en 1974, elle vit aujourd’hui à Moscou. Danseuse, photographe, peintre. Une grande artiste qui commence à être connue en Russie Son site :. www.belkina.ru/

2 commentaires:

Olga a dit…

Si tu vas en Carélie, n'oublies pas crème anti-moustique!

Carmilla Le Golem a dit…

S'il n'y avait que les moustiques !
Tu le sais sans doute mieux que moi, Olga. Il y a aussi des horreurs comme les moucherons et les taons. C'est un supplice. Mais ce n'est pas seulement en Russie, c'est aussi le cas en Finlande et en Suède. Et puis, ça dépend des périodes de l'année.

Carmilla